Revue de jurisprudence en droit social du deuxième trimestre 2017 - Par le cabinet Schwal & Associés

Revue de jurisprudence en droit social du deuxième trimestre 2017 - Par le cabinet Schwal & Associés

Publié le : 03/07/2017 03 juillet juil. 07 2017

I – CONTRAT DE TRAVAIL

> Validité de la condition suspensive d’un CDD

  •  Les dispositions d'ordre public de l'article L.1243-1 du code du travail, selon lesquelles le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme que dans les seuls cas visés par ce texte ne prohibent pas la stipulation de conditions suspensives.
  • Ainsi, sous réserve qu’il n’ait pas commencé à être exécuté, un CDD conclu sous condition suspensive ne produit pas d’effet si cette condition n’est pas remplie.  Cass. Soc., 15 mars 2017, n°15-24.028

> Requalification du CDD en CDI

  • N’est pas temporaire et doit être requalifié en CDI, le recours à des CDD d’usage successifs avec le même salarié, de manière quasi-continue durant deux ans et demi pour occuper le même poste sur des fonctions correspondant à l'activité principale de l'employeur et sur un même secteur géographique. Cass. Soc., 26 janvier 2017, n°15-26.845

> Renouvellement de la période d’essai

  • Conformément à l’article 1103 du Code civil, le renouvellement de l'essai ne peut résulter que d'un accord exprès des parties intervenu au cours de la période initiale, même si l’accord de branche ne le mentionne pas.  CE, 15 mars 2017, n°387060

II – DUREE DU TRAVAIL  

> Notion de cadre dirigeant : Appréciation au sein d’un groupe de sociétés

  • Participe à la direction de l’entreprise et répond ainsi à la définition de cadre dirigeant, le salarié :
    • dont la fiche de poste précise qu'il est chargé d'élaborer, de proposer et de mettre en place la stratégie industrielle,
    • qui perçoit le salaire le plus élevé de l'entreprise,
    • qui représente la direction auprès des institutions représentatives du personnel, des administrations et en général de tous les tiers sous la seule autorité du président de la société,
    • qui définit les ressources techniques et humaines nécessaires à l'exploitation et élaborant le plan d'investissement du site, peu important que ces missions s’exercent conformément aux consignes du Directeur général du groupe.Cass. Soc., 5 mai 2017, n°16-13.160

> Modification du système d’astreinte

  • L'employeur ne peut unilatéralement modifier le système d’astreinte lorsque l’accord d'entreprise qui l’a mis en place prévoit expressément qu'il pourra être révisé conformément aux dispositions légales et renvoie à la négociation collective pour le réviser. Cass. soc., 1er mars 2017, n°14-22.269

> Mise en place des astreintes par voie contractuelle : non

  • N’ont aucun caractère obligatoire pour le salarié, les astreintes mentionnées au contrat de travail qui n’ont été ni prévues par un accord collectif ni fixées après consultation des institutions représentatives du personnel. Cass. soc., 23 mai 2017, n°15-24.507
NB : La loi travail n’a pas remis en cause l’exigence d’un accord collectif – avec primauté donnée à l’accord d’entreprise désormais – ou d’une décision de l’employeur prise après consultation des IRP et information de l’inspecteur du travail.

III – REMUNERATION

> Preuve du calcul de la rémunération variable

  • Lorsque le calcul de la rémunération dépend d'éléments détenus par l'employeur, celui-ci est tenu de les produire en vue d'une discussion contradictoire. Cass. soc., 1er mars 2017, n°15-28.198

IV – ACCIDENT / MALADIE / MATERNITE / INAPTITUDE

> Maternité et travailleur étranger

  • Les dispositions d'ordre public de l'article L. 8251-1 du code du travail s'imposent à l'employeur :
    • qui ne peut, directement ou indirectement, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France,
    • et doit donc licencier le salarié se trouvant dans cette situation, y compris en présence d’un état de grossesse déclaré. Cass. soc., 15 mars 2017, n°15-27.928

*NB : Dans cet arrêt, les juges font donc prévaloir l’article L.8251-1 du code du travail sur l’article L.1225-4 du même code.

*NB : La Cour de cassation avait déjà jugé que la protection d’ordre public des représentants du personnel doit être écartée lorsque le salarié ne dispose plus du titre l’autorisant à travailler en France, permettant à l’employeur de le licencier sur ce fondement, sans autorisation préalable de l’inspecteur du travail (Cass. Soc. 5 novembre 2009 n°08-40.923)

> Accident du travail et protection contre le licenciement

  • Continue de bénéficier de la protection propre aux accidents du travail le salarié qui n’a été soumis à aucune visite de reprise à l'issue des arrêts de travail successifs et continus intervenus postérieurement à cet accident, peu important que ces arrêts se prolongent en maladie. Cass. soc., 26 avril 2017, n°16-12.295

> Maladie et salaire garanti

  • Lorsque le maintien conventionnel de salaire est défini par référence « aux appointements nets à plein tarif », il doit être calculé en fonction du salaire qu’aurait perçu le salarié s’il avait continué à travailler. Cass. soc., 25 janvier 2017, n°15-24.119

> Aptitude avec réserves : Mise en œuvre de la clause de mobilité et absence de discrimination

  • N’est pas discriminatoire le licenciement d’un salarié ayant refusé sa mobilité mise en œuvre par l’employeur, en exécution d’une clause contractuelle, afin de répondre aux préconisations du médecin du travail émises dans le cadre d’un avis d’aptitude avec réserves. Cass. Soc., 26 avril 2017, n°14-29.089

NB : Il est recommandé de s’assurer auprès du médecin du travail de la compatibilité du poste avec les préconisations médicales avant de mettre en œuvre la clause de mobilité à la suite d’un avis d’aptitude avec réserves.

> Inaptitude : Consultation des DP

Rappel : Depuis le 1er janvier 2017, l’obligation de consultation concerne l’inaptitude d’origine professionnelle ou non.
  • N’est soumise à aucun formalisme spécifique et peut donc intervenir par voie électronique, la convocation des délégués du personnel à une réunion destinée à recueillir leur avis sur le reclassement d’un salarié déclaré inapte. Cass. soc., 23 mai 2017, n°15-24.713
  • L’omission de la formalité substantielle de consultation des délégués du personnel et la méconnaissance par l'employeur des dispositions relatives à la motivation de la lettre de licenciement du salarié déclaré inapte ne peuvent être sanctionnées que par une seule et même indemnité, au moins égale à celle prévue par l'article L.1226-15 du code du travail (12 mois de salaire). Cass. soc., 23 mai 2017, n°16-10.580

> Périmètre de reclassement (franchises)

  • La preuve du critère de permutabilité du personnel n’incombe pas uniquement à l’employeur. Cass. soc., 15 mars 2017, n°15-24.392
NB : La Cour de cassation transpose ici sa jurisprudence relative au reclassement dans le cadre d’un licenciement économique (Cass. soc.,16 novembre 2016 n°14-30.063 ; 25 mars 2009, n°07-42.708).

> Notion de poste disponible

  • Sauf fraude, ne constitue pas un poste disponible pour le reclassement d'un salarié déclaré inapte, l'ensemble des tâches confiées à des stagiaires qui ne sont pas salariés de l'entreprise mais suivent une formation au sein de celle-ci. Cass. soc., 11 mai 2017, n°16-12.191

V – CONDITIONS DE TRAVAIL

> Obligation de formation

  • L'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation du salarié à son poste de travail et de veiller au maintien de sa capacité à occuper un emploi pendant toute la durée de la relation de travail. Cass. soc., 21 avril 2017, n°15-28.640

NB : Cette obligation relève de l’initiative de l’employeur, peu important que le salarié n’effectue aucune demande de formation (Cass. Soc. 12 octobre 2016 n°15.19-811).

> Congés payés : Prise de la 5e semaine

  • Il appartient à l’employeur de prouver qu’il a bien mis le salarié en mesure de prendre sa cinquième semaine de congés payés. Cass. soc., 26 janvier 2017, n°15-26.202

NB : Cette règle ne s’applique pas à la prise de congés conventionnels (Cass. Soc., 12 mai 2015, n°13-20.349).

NB : En cas de contestation, l’employeur doit donc rapporter la preuve de l’information faite aux salariés sur la période de prise des congés payés au moins deux mois avant son ouverture et sur la communication de l’ordre des départs en congés à chaque salarié un mois avant son départ.

> Pouvoir disciplinaire : Qualification de sanction

  • A la nature d’une sanction une lettre adressée à un salarié à la suite d’agissements considérés comme fautifs lui indiquant que la confiance placée en lui est largement entamée, ce qui est de nature à affecter sa carrière.  En conséquence, cette sanction devrait être précédée d’un entretien préalable car elle n’a plus la nature d’une sanction mineure. Cass. soc., 3 février 2017, n°15-11.433

Pour mémoire : il en est de même lorsque l’employeur met en demeure le salarié d’apporter plus de soin à son travail, lorsqu’il l’invite de façon impérative à un changement radical avec mise au point ultérieure, lorsqu’il l’avertit qu’il ne pourra plus tolérer une telle attitude portant préjudice aux missions qui lui sont confiées et à l’organisation du service.

> Pouvoir disciplinaire : Exigence d’un règlement intérieur

  • Une sanction disciplinaire autre que le licenciement ne peut être prononcée contre un salarié par un employeur employant habituellement au moins vingt salariés que si elle est prévue par le règlement intérieur prescrit par l'article L. 1311-2 du code du travail. Cass. soc., 23 mars 2017, n°15-23.090

 NB : Bien que le juge des référés n’ait pas le pouvoir d’annuler la sanction, il peut ordonner à l’employeur de le faire afin de faire cesser le trouble manifestement illicite qui résulte de l’existence d’une sanction prononcée malgré l’absence de règlement intérieur obligatoire.

> Droit d’opposition du salarié lorsque la sanction envisagée emporte modification de son contrat de travail.

  • La Cour de cassation renvoie au Conseil d’Etat l’appréciation de la légalité du statut des agents de la RATP, moins favorable que celui des salariés de droit commun, en ce qu'il autorise la rétrogradation sans prévoir, à aucun moment, de recueillir le consentement de l’agent. Cass. soc., 20 avril 2017, n°15-19.979

NB : La Cour de cassation érige dans cet arrêt un principe général selon lequel un employeur ne peut pas imposer à un salarié soumis au Code du travail, comme sanction d’un comportement fautif, une rétrogradation impliquant la modification de son contrat de travail.

> Limitation du pouvoir disciplinaire en l’absence de visite de reprise

  • L'employeur qui n'a pas organisé la visite de reprise obligatoire à l'issue d'une absence pour maladie d’au moins 30 jours peut seulement reprocher au salarié, dont le contrat de travail demeure suspendu, des manquements à l'obligation de loyauté. Cass. soc., 6 mars 2017, n°15-27.577

> Egalité de traitement : Présomption de justification énoncée par la Cour de cassation

  • Les différences de traitement entre catégories professionnelles ou entre des salariés exerçant, au sein d'une même catégorie professionnelle, des fonctions distinctes, opérées par voie de convention ou d'accord collectifs, négociés et signés par les organisations syndicales représentatives, investies de la défense des droits et intérêts des salariés et à l'habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote, sont présumées justifiées de sorte qu'il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu'elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle.
  • Au regard de ce principe, est légitime la différence de traitement prévue par une convention collective relative à une indemnité de repas plus élevée selon la catégorie professionnelle dont relèvent les salariés. Cass. soc., 26 avril 2017, n°15-23.968

> Harcèlement moral

  • Expert en matière d'évaluation et de management des hommes et des équipes, un RRH qui cautionne les méthodes managériales inacceptables d’un salarié avec lequel il travaille en très étroite collaboration, mettant ainsi en danger tant la santé physique que mentale des salariés en les laissant perdurer, commet une faute. Cass. soc., 8 mars 2017, n°15-24.406

> Transfert d’entreprise : Sort du statut cadre

  • Au terme du délai de survie et en l’absence d’accord de substitution, un cadre ne peut prétendre au maintien pour l'avenir de son statut dès lors que ce statut ne résulte pas du contrat de travail mais des seules dispositions de la convention collective qui ne s'applique plus. Cass. Soc., 20 avril 2017, n°15-28.789

VI – RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL

> Signataire de la lettre de licenciement

  • Est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement dont la procédure a été conduite par l'expert-comptable de l'employeur, personne étrangère à l'entreprise, y compris s’il a signé pour ordre la lettre de licenciement. Cass. soc., 26 avril 2017, n°15-25.204

NB : N’est pas considéré comme une personne étrangère à l’entreprise un membre de la Société mère assurant la gestion du personnel des filiales du groupe et bénéficiant à ce titre d’une délégation de pouvoir régulière (Cass. Soc., 16 mai 2007, n°06-40.307) : il en est ainsi du DRH (Cass. Soc., 15 décembre 2011, n°10-21.926) ou du Directeur Financier de la Société mère vis-à-vis d’une filiale détenue à 100 % (Cass. Soc., 30 juin 2015, n°13-28.146).

NB : Cette interdiction vaut également pour la signature de la convocation à un entretien préalable (Cass. Soc., 7 décembre 2011, n°10-30.222)

> Insuffisance professionnelle

  • N’est pas fondé le licenciement pour insuffisance professionnelle lorsque la faiblesse des résultats n'est pas imputable aux capacités de la salariée mais à des absences de personnels au sein du bureau dont elle avait la responsabilité et à la reprise de son activité à temps partiel à l’issue de son congé maternité. Cass. soc., 22 février 2017, n°15-25.023

NB : Il s’agit d’une application du principe selon lequel l’employeur ne peut pas licencier un salarié pour insuffisance professionnelle s’il ne lui fournit pas les moyens matériels et humains nécessaires à la bonne exécution de sa mission (Cass. Soc 19 octobre 2010 n°09-42.225 notamment)

> Faute grave

  • Constitue une faute grave le fait d’inciter un proche à se rendre sur le lieu de travail pour faire acte de violence dans l’entreprise. Cass. soc., 2 mars 2017, n°15-15.769

NB : En revanche, la simple passivité du salarié face aux agissements commis par un proche ne constitue pas une faute grave (Cass. Soc. 21 mars 2000 n°98-40.130).

> Licenciement économique : Cessation partielle d’activité

  • Seule une cessation complète et définitive de l'activité de l'employeur peut constituer en elle-même une cause économique de licenciement, quand elle n'est pas due à une faute ou à une légèreté blâmable.
  • En conséquence, une cessation partielle de l'activité de l'entreprise ne justifie un licenciement économique qu'en cas de difficultés économiques, de mutation technologique ou de réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité, peu important que la fermeture d'un établissement de l'entreprise résulte de la décision d'un tiers. Cass. soc., 23 mars 2017, n°15-21.183

NB : La cessation d’activité figure depuis le 1er décembre 2016 parmi les motifs économiques prévus par l’article L1233-3 du code du travail.


> CSP : Remise du dossier

  • La non remise du dossier relatif au CSP lors de l’entretien préalable peut créer un préjudice pour le salarié, quand bien même cette carence n’est pas imputable à l’employeur. Cass. soc., 7 mars 2017, n°15-23.038

> Clause de non concurrence et date limite de renonciation

  • En cas d’adhésion au CSP et même en présence de stipulations contraires, l’employeur qui souhaite renoncer à l’exécution de la clause de non concurrence doit le faire au plus tard à la date du départ effectif de l’intéressé de l’entreprise. Cass. soc., 2 mars 2017, n°15-15.405

NB : La Cour de cassation a déjà jugé que l’employeur qui dispense le salarié de l’exécution de son préavis doit, s’il entend renoncer à l’exécution de la clause de non concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l’intéressé dans l’entreprise y compris en présence de stipulations ou de dispositions contraires (Cass. Soc. 21 janvier 2015 n°13-24.471)  

> Rupture conventionnelle : Homologation

  • En ce qu’elle ne crée pas de droit acquis au profit des tiers ou des parties à la convention, la DIRECCTE peut valablement revenir sur sa décision de refus d’homologation. Cass. soc., 12 mai 2017, n°15-24.220

NB : Passé le délai de rétractation et une fois la demande d’homologation adressée, il est acquis que l’employeur et le salarié entendent rompre de manière bilatérale le contrat de travail.
Néanmoins, il a été jugé qu’une fois ce délai de rétraction écoulé, le salarié pouvait prendre acte de la rupture de son contrat de travail en présence de manquements de l’employeur commis ou dont il aurait eu connaissance entre la fin du délai de rétractation et la date de fin du contrat prévue par la convention (Cass. Soc. 6 octobre 2015)


NB : A l’inverse, il ne semble pas possible pour la DIRECCTE de revenir sur sa décision d’homologation expresse ou implicite car celle-ci est créatrice de droit. L’administration lui interdit d’ailleurs de retirer l’homologation implicite faute de l’avoir rejetée pendant le délai d’instruction (Circ. DGT 2008-11 du 22 juillet 2008).

> Prise d’acte : Formalisme

  • Si la prise d'acte de la rupture du contrat de travail n'est soumise à aucun formalisme et peut valablement être présentée par le conseil du salarié au nom de celui-ci, c'est à la condition qu'elle soit adressée directement à l'employeur. Cass. soc., 29 mars 2017, n°15-28.992

> Prise d’acte en raison d’une sanction disciplinaire abusive  

  • Le salarié peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail en contestant une sanction disciplinaire, dès lors que cette sanction est susceptible d’empêcher la poursuite du contrat de travail. Cass. soc., 2 mars 2017, n°15-26.945

> Prise d’acte en raison de l’absence de versement de primes

  • Le défaut de paiement de primes dues sur plusieurs années ne justifie pas une prise d’acte si une régularisation est intervenue avant la prise d’acte. Cass. soc., 21 avril 2017, n°15-19.353

> Résiliation judiciaire et manquement ancien

  • N’est pas de nature à faire obstacle à la poursuite du contrat de travail et à justifier en conséquence sa résiliation judiciaire, le manquement de l’employeur consistant au non-paiement du solde de la part variable de la rémunération du salarié remontant à plusieurs années et alors même que le salarié ne l’a invoqué que plus d'une année après la saisine du Conseil de Prud’hommes. Cass. soc., 21 avril 2017, n°15-28.340

> Indemnité de licenciement : calcul en cas de maladie

  • Afin de respecter le principe de non-discrimination lié à l’état de santé, le salaire de référence à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié, celui des douze ou des trois derniers mois précédant l'arrêt de travail pour maladie. Cass. soc., 23 mai 2017, n°15-22.223

NB : En revanche, il n’y a pas lieu de reconstituer fictivement le salaire ni de s’en tenir à la période précédant immédiatement la rupture du contrat de travail.

NB : En matière de mi-temps thérapeutique, la Cour de cassation avait à l’inverse jugé que l’indemnité devait en l’absence de disposition conventionnelle contraire, être calculée sur la base des seuls salaires perçus par le salarié dans le cadre de son temps partiel (Cass. Soc 26 janvier 2011 n°09-66.453). On peut, au regard de la large publicité que la Cour de cassation entend donner à l’arrêt du 23 mai 2017, s’interroger sur le maintien de cette jurisprudence.

> Nullité du licenciement et réintégration

  • Le salarié réintégré n’acquiert pas de congés payés pendant la période d’éviction, laquelle ouvre droit à une indemnité d'éviction. Cass. soc., 11 mai 2017, n°15-19.731

> Rupture anticipée du CDD à l’initiative de l’employeur

  • L’employeur à l’initiative de la rupture anticipée du CDD pour faute grave ne peut prétendre à l’indemnité prévue par l’article L.1243-3 du code du travail qui concerne seulement la rupture anticipée du contrat à durée déterminée à l'initiative du salarié. Cass. soc., 26 avril 2017, n°15-21.196

VII – REPRESENTATION DU PERSONNEL

> Elections professionnelles

  • L'édition par l'employeur d'un bulletin unique pour les deux listes de candidats est de nature à affecter la sincérité des opérations électorales et, s'agissant d'un principe général du droit électoral, constitue une irrégularité justifiant à elle seule l'annulation des élections.
NB : La Cour de cassation consacre de manière peut être critiquable dans cet arrêt un nouveau principe général du droit électoral.
Cass. soc., 8 mars 2017, n°16-60.106

> Budgets du Comité d’entreprise

Rappel : sauf engagement plus favorable, la masse salariale servant au calcul de la subvention de fonctionnement comme de la contribution patronale aux activités sociales et culturelles s'entend de la masse salariale brute correspondant au compte 641 "Rémunérations du personnel" à l'exception des sommes qui correspondent à la rémunération des dirigeants sociaux, à des remboursements de frais, ainsi que celles qui, hormis les indemnités légales et conventionnelles de licenciement, de retraite et de préavis, sont dues au titre de la rupture du contrat de travail.
  • Les indemnités spécifiques de rupture conventionnelle, dans leur partie supérieure à celles correspondant aux indemnités légales et conventionnelles, n'entrent pas dans le calcul de la masse salariale brute.
En revanche, ayant un caractère salarial, les indemnités compensatrices de congés payés, de conversion monétaire de compte épargne-temps et de contrepartie obligatoire en repos entrent dans le calcul. 

> Expertise du CE

  • Le juge peut réduire le montant des honoraires de l’expert-comptable du comité d’établissement lorsque cet expert : - avait déjà une connaissance de la situation comptable et financière de l’entreprise en raison des expertises précédemment réalisées pour le compte du comité central, - et ne justifiait pas du dépassement de plus de 30 % du temps de travail initialement annoncé. Cass. soc., 8 mars 2017, n°15-22.882


 NB : pour fixer le montant des honoraires, les juges peuvent tenir compte du fait que les travaux facturés ont pour partie déjà été réalisés par la même société d’experts lors de précédentes interventions effectuées au cours des exercices antérieurs (Cass. Soc 24 octobre 2012 n°11-24.595)

> Expertise du CHSCT et secret médical

  • Dans les établissements de santé, l’employeur peut se prévaloir du secret médical pour interdire à l’expert agréé du CHSCT l’accès à certaines parties de l’établissement ou aux données médicales personnelles des patients. Cass. soc., 20 avril 2017, n°15-27.927

> Heures de délégation : Exercice des mandats et repos compensateur

  • L’élu qui utilise ses heures de délégation durant le temps de repos acquis au titre de la contrepartie obligatoire en repos ne peut solliciter que le report de ses jours de repos et non leur rémunération. Cass. soc., 23 mai 2017, n°15-25.250

> Point de départ de la protection liée à une candidature aux élections

  • En cas de convocation à entretien préalable par acte d’huissier de justice, c’est à la date de la remise de la convocation par l’employeur à l’huissier qu’il convient de se placer pour apprécier si l’employeur avait connaissance de la candidature et ouvrir droit au bénéfice de la protection pour le salarié. Cass. soc., 22 mars 2017, n°15-23.103

> Saisine de l’inspecteur du travail d’une demande d’autorisation de mise à la retraite

  • Lorsque l'autorité administrative estime que le motif pour lequel un employeur lui demande l'autorisation de rompre le contrat de travail d'un salarié protégé n'est pas fondé, elle ne peut légalement accorder l'autorisation demandée en lui substituant un autre motif de rupture de ce contrat de travail, alors même que cet autre motif aurait été de nature, s'il avait été présenté par l'employeur, à justifier la rupture du contrat de travail. CE, 20 mars 2017, n°392296

> Saisine de l’inspecteur du travail d’une demande d’autorisation du transfert  du contrat de travail

  • Lorsqu’un comité d’entreprise a été mis en place au niveau de l’UES, la cession d’une société de l’UES constitue un transfert partiel d’activité obligeant l’employeur à solliciter l’autorisation de l’inspection du travail pour le transfert des salariés protégés. Cass. soc., 24 mars 2017, n°15-24.005

> Saisine de l’inspecteur du travail avant l’arrivée du terme du CDD

  • Le salarié protégé dont le contrat à durée déterminée a été irrégulièrement rompu peut prétendre, en plus de l’indemnité pour violation du statut protecteur, à une indemnité résultant du caractère illicite de son licenciement d'un montant au moins égal à celui prévu à l'article L. 1235-3 du code du travail. Cass. soc., 21 avril 2017, n°15-23.492


NB : L’arrivée du terme du CDD conclu avec un salarié protégé n’entraine sa rupture qu’après constatation par l’inspecteur du travail que le salarié ne fait pas l’objet d’une mesure discriminatoire, l’employeur devant à cette fin saisir l’autorité administrative un mois avant l’arrivée du terme du CDD (Article L.2421-8 du Code du travail).
 

VIII – SECURITE SOCIALE – RETRAITE - PREVOYANCE

> Assujettissement : Indemnités transactionnelles rémunérant les contraintes liées à l’activité

  • Les indemnités transactionnelles versées en contrepartie ou à l’occasion du travail et visant à rémunérer des contraintes inhérentes à l’activité professionnelle constituent un élément de rémunération entrant dans l’assiette de cotisations et contributions dues par l’employeur. Cass. civ.2, 19 janvier 2017, n°16-11.472

> Assujettissement : Cadeaux et bons d’achat

  • Sauf s’ils constituent un secours, les bons d’achat octroyés par l’employeur sont soumis à cotisations en tant qu’avantages attribués en contrepartie ou à l’occasion du travail, les juges ne pouvant exclure cet assujettissement sur le fondement d’une tolérance issue d’une circulaire ACOSS et d'une lettre ministérielle, lesquelles sont dépourvues de toute portée normative. Cass. civ.2, 30 mars 2017, n°15-25.453


NB: Cet arrêt est dans la lignée de la jurisprudence relative aux bons d’achats remis par le comité d’entreprise (Cass. Soc., 12 novembre 1992, n°91-11.098 et Cass. soc., 11 juillet 2005, n°04-30.188) ou de la jurisprudence sur les médailles du travail (Cass. Soc., 16 septembre 2010, n°09-10.346).

NB : Seule une circulaire ou une instruction du ministre chargé de la sécurité sociale régulièrement publiée garantit le cotisant ayant appliqué la législation relative aux cotisations et contributions sociales selon l’interprétation en résultant contre tout redressement d’une URSSAF qui serait fondé sur une interprétation différente (Article L.243-6-2 du code de la sécurité sociale).

IX – NORMES COLLECTIVES

> Opposition à un accord collectif

  • L’opposition à l’entrée en vigueur d’un accord collectif peut être notifiée aux signataires par courrier électronique. Cass. soc., 23 mars 2017, n°16-13.159


NB : Cet arrêt s’inscrit dans la dernière jurisprudence de la Cour de cassation exigeant que l’opposition soit reçue par les signataires avant l’expiration du délai légal requis (Cass. Soc., 10 janvier 2017, n°15-20.335).

NB : La loi travail a généralisé progressivement les accords d’entreprise majoritaires à l’égard desquels le droit d’opposition n’est plus applicable. Il en est d’ores et déjà ainsi en matière de durée du travail, de repos et de congés. Le droit d’opposition reste, sauf exception applicable jusqu’au 31 août 2019 aux accords d’entreprise conclus dans les autres domaines.


> Exigence de loyauté dans les négociations

  • La nullité d'une convention ou d'un accord collectif est encourue :
    • lorsque toutes les organisations syndicales n'ont pas été convoquées à sa négociation,
    • si l'existence de négociations séparées est établie,
    • si toutes les organisations syndicales n'ont pas été mises à même de discuter les termes du projet soumis à la signature en demandant, le cas échéant, la poursuite des négociations jusqu'à la procédure prévue pour celle-ci.
    • Si ces principes sont respectés, n’est pas illicite la tenue de rencontres bilatérales au cours desquelles les parties discutent de manière séparée pour faire avancer leur position et tenter de dégager un compromis avant de le soumettre en séance plénière. Cass. soc., 8 mars 2017, n°15-18.080


NB : Depuis la loi travail, l’article L.2222-3-1 du Code du Travail permet la conclusion d’un accord collectif visant à définir la méthode pour que la négociation s’accomplisse dans des conditions de loyauté et de confiance mutuelle entre les parties.

> Règlement intérieur : Consultation des IRP en cas de transfert

  • Pour être opposable aux salariés, le règlement intérieur de l’entreprise doit être soumis aux représentants du personnel de l’établissement distinct absorbé. CE, 20 mars 2017, n°391226


NB : cet arrêt soulève de nombreuses interrogations quant à la portée devant y être donnée. Doit-on désormais envisager, en cas de transfert d’un établissement distinct, une consultation des DP dans toutes les matières où la loi impose leur consultation « à défaut » ? Qu’en est-il du sort du règlement intérieur en cas de transfert d’entreprise ?


X – JUDICIAIRE  / CONTENTIEUX

> Mode de preuve

  • L’absence de déclaration simplifiée à la CNIL d’une messagerie professionnelle non pourvue d’un contrôle individuel de l’activité des salariés ne rend pas illicite la production en justice des courriels adressés par l'employeur ou par le salarié dont l'auteur ne peut ignorer qu'ils sont enregistrés et conservés par le système informatique. Cass. soc., 1er juin 2017, n°15-23.522

Historique

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